En 1994, un ami me demande d'auditionner, à la dernière minute, pour l'enregistrement dune voix de générique pour une émission à venir sur le thème du Sida, "Ruban Rouge"...Bien que superstititieux, j'accepte...C'est une mélodie sans saveur, ni odeur qu'il faut de ce pas mettre en boite, ça urge. Fred, le "compositeur/arrangeur" me donne dans le studio, derrière la vitre, ses intructions. Il lui faut une voix au registre étendu allant du grave du baryton au medium haut de l'Alto. Pour l'étendue vocale, je fais l'affaire...
Au résultat, on dirait plusieurs voix, il n'y en a cependant qu'une.
Les graves sont enregistrés. Hervé Chabalier, le patron de Capa, la société productrice, me demande de vocaliser et d'entendre les aigüs, trop tard pour lui, le contrat est signé...je l'envoie tout bonnement bouler, en lui disant que le seul Maitre à bord étant Fred, je me préserve l'organe. Caprice de Diva ?
Je n'ai jamais su bien agir avec autrui, surtout avec les Puissants qui ont tous des éléments de leur personnalité qui m'agacent, tellement habitués sont-ils à ce qu'on leur lèche le troufignon.
Pauvre Chabalier, qui, assis sur son banc, avait l'air misérable dans son coin. J'ai appris par la suite qu'il piccolait. Un film je crois a eu lieu sur le sujet. Le malheur des grands est tellement, tellement plus profond, n'est-ce pas ?
En deux heures, Ca y est ! C'est dans la boite. Evidemment, je ne suis nullement satisfait du résultat...
Après une intervention dans les Nuits Fauves, c'est désormais quelques uns, appellons ça, de
mes borborygmes, ablutions, gargarismes... qui annoncent un peu d'espoir, sur France 3, "Ruban Rouge", un programme regardé par tant d'homos malades et ceux qui les entourent... mais quel espoir à l'époque ? Seul existe encore l'Azt, cette molécule qui tue ! On évoque les bi-thérapies. C'est un concours de Vitesse avec la Mort. Et tout ce qu'on ignore encore, et plus de 15 ans plus tard, toujours, sur cette maladie, décidément bien curieuse.
Cela me coupe la chique quand j'entends fin 94 que le générique passe plusieurs fois par jour sur un chaine de télévision...Cela même m'indispose. On dirait la voix d'un monstre marin, dont le cri est entre le Sos et la menace.
Cela m'est même insupportable, la Voix, cette espèce d'annonciation maléfique, sirène ambigüe qui entame son chant tragique sans qu'une mélodie digne de ce nom ne la hisse vers la Beauté... Un récitatif lancinant qui ne décollerait pas...Je déteste.
Quasiment, de ce jour, la sexualité est devenue fantasmatique si ce n'est fantômatique. Cela m'a effrayé de voir l'émission et, face à la belle Elisabeth Martichoux et au beaucoup moins beau Serge Héfez, qui fait sa docte leçon le doigt levé, ces visages émaciés, ces corps à deux doigts de calancher, ces regards désespérés... Ces menus et faux espoirs... cette association Jeunesse-Sexualité-Maladie...
A peine les homos sortent-ils du Ghetto, qu'ils pénétrent ceux des couloirs d'hôpital...
La coupe est pleine. les soucis de santé personnels que je traversais de mon côté ne pouvaient, en plus, même symboliquement, être agrémentés de ceux de milliers d'autres.
Toute sexualité à Paris fait désormais peur, tant de gens apprennent dans l'entourage qu'ils sont malades. De nombreux ami(e)s, même hétérosexuels cessent de collectionner les aventures.
Les Traitements sont tellement violents pour l'organisme qu'on ne sait plus si ce sont eux ou la maladie qui assassinent.
Ce foutu Sida tissait ainsi des acquaintances ombrageuses et infernales avec la sexualité.
Toute sexualité à Paris fait désormais peur, tant de gens apprennent dans l'entourage qu'ils sont malades. De nombreux ami(e)s, même hétérosexuels cessent de collectionner les aventures.
Les Traitements sont tellement violents pour l'organisme qu'on ne sait plus si ce sont eux ou la maladie qui assassinent.
Ce foutu Sida tissait ainsi des acquaintances ombrageuses et infernales avec la sexualité.
En fin d'année suivante, et c'est sans parler des difficultés pour être payé de cet enregistrement, je décidais d'arrêter ce métier de miséreux.
Barbara, elle-même, avait écrit une de ses plus mauvaises chansons à ce sujet, "Sid'Amour à Mort"...
Décidément, pour personne, le Sida ne fut une bonne source d'inspiration.
http://odile.maurin.free.fr/odile1/crbst_9.html
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